Un parcours médicinal des plantes pays
Difficile de traiter un sujet aussi vaste dans la petite heure qui m’est impartie. J’ai du donc choisir une trajectoire directe en concentrant mon exposé sur les plantes indigènes et endémiques dites plantes pays, c'est à dire : celles qui étaient là lors de l’installation de l’homme.
PREMIÈRE PARTIE
L’empirisme réunionnais : sa naissance, son évolution, son apogée, son déclin, son avenir
Tout a commencé en 1665. Par petits groupes, des français accompagnés de malgaches, hommes et femmes arrivent, plantent légumes, fruits, tabac, etc, chassent un gibier abondant et prospectent la forêt à la recherche de bois précieux et de drogues très appréciées à l’époque comme l’aloès, le benjoin, le quinquina etc. Le climat de l’île est réputé sain et vivifiant. On ne connaît pas d’autres maladies que le mal de crampe ou tétanos et le flux de sang ou diarrhée. Mais ces hommes et ses femmes et leurs enfants ont tout naturellement quelques petites misères quotidiennes qu’il faut soigner. Le chirurgien de la Compagnie : Antoine Royer habite Sainte Suzanne ; on ne peut disposer de lui facilement. Il faut donc parer au plus pressé et ils ont autour d’eux une pharmacie verte qui leur offre ses trésors ; ils ne s’en privent pas. Ils vont faire des expériences sans théorie et sans raisonnement. C’est l’empirisme, un empirisme réunionnais unique, spécifique et original, issu d’un métissage entre l’esprit pionnier et prospecteur des français et la connaissance séculaire des plantes de leurs serviteurs et de leurs épouses malgaches.
Ainsi très rapidement ils vont se constituer une petite pharmacopée, qui va s’enrichir au fil des ans. Ils trouvèrent d’abord dans la forêt : aloès, une plante qu’ils crurent être du benjoin,le tacamaka des hauts, le faux poivre, l’esquine ou croc de chien, les deux cafés sauvages. Des noms apparaissent : vieux français : osto, affouche ; malgaches : mafatamboa, mapou, quivi, fondamane, ambaville, faham. .Les malgaches sont des experts en poisons, et il se chuchote que le Gouverneur Vauboulon aurait été envoyé ad patres par un breuvage infaillible de leur cru.
A partir de 1720, avec l’extension des plantations de café et l’intensification de l’esclavage, les relations vont se durcir entre maîtres et esclaves Un décret du Roi va interdire aux esclaves de soigner les blancs. D’autre part les maîtres n’assurent plus les soins médicaux de leurs esclaves, qui doivent donc se débrouiller seuls. Le marronnage va encore leur donner plus d’occasions d’utiliser les plantes. L’empirisme progresse, et à l’aube du XIX° siècle, il existe bien deux systèmes de santé dans l’île : un, exercé par les chirurgiens et l’autre, par les empiriques et contrairement à ce qu’on pourrait penser c’est le dernier qui va avoir plus de succès. Les médicaments importés coûtent très cher et ils ne sont pas toujours de bonne qualité. Le médicament miracle de l’époque est le remède Leroy, un purgatif violent vendu en flacons avec des numéros : 1, 2, 3, 4, 5, que l’on faisait avaler au malade progressivement ; il fallait être solide pour résister à ce remède de choc qui était accompagné en plus de saignées et de sangsues. Les médecins, eux, ne veulent pas entendre parler de ces plantes locales. Il n’y eut jamais d’apothicaire dans l’île. Le premier pharmacien arriva en 1819. Il ne fit pas fortune.
L’abolition de l’esclavage en 1848 va modifier et amplifier même cette situation. Les esclaves libérés et les petits colons ruinés vont s’éparpiller dans la nature et occuper les hauts de l’île, les îlets et les cirques ; l’empirisme va encore s’enrichir. On se soigne en famille, les recettes se transmettent par voie orale, de père en fils ou de mère en fille ; parmi ces hommes et ces femmes, les plus doués, les plus motivés vont émerger et gagner la confiance de leurs voisins, puis du village et de la commune. Ils deviennent des empiriques ou simples, des personnages parfaitement intégrés dans le tissu social environnant, qui partagent les joies et les peines de leurs concitoyens, et soignent bénévolement leurs petits maux quotidiens, exerçant ainsi un véritable sacerdoce. Ils rendent service, ne divulguent pas leurs recettes et se font le plus discret possible pour rester en parfaite harmonie avec la médecine officielle. Entre les deux médecines il y a un accord tacite, un pacte de non agression qui profite à tout le monde. La population en a bien besoin à une époque où l’état sanitaire est déplorable. En cette fin du XIX° siècle l’île d’éden est devenue l’île aux fièvres. Les vagues successives d’engagés, malgré les quarantaines ont emmené avec elles toutes sortes de maladies : épidémies de variole et de choléra, typhus, paludisme, tuberculose, maladies vénériennes, maladies parasitaires, révolutions de vers chez les enfants, tout cela sur un fond de misère et d’alcoolisme.
Un autre système de médecine va apparaître aux abords des usines sucrières et des grands domaines : la médecine traditionnelle hindoue. Ce n’est pas de la médecine ayurvédique, ni une médecine issue d’apports de la pharmacopée indienne, mais l’adaptation à la Réunion de pratiques médico - religieuses des villages du sud de l’Inde : télingas, lascars, calcuttas, malbars. C’est une médecine dans laquelle toutes les maladies se rattachent aux relations avec l’univers surnaturel : psychologique, astral, spirituel et ésotérique. Les moyens naturels, donc les plantes, ne sont que complémentaires. Cette médecine toute pleine de mystère, voire de magie, va plaire et concurrencer sérieusement les deux systèmes existants. Plus tard, d’ailleurs, certains créoles vont s’en inspirer pour élaborer une sorte de médecine traditionnelle créole différente à mon sens de la médecine populaire familiale dont je vous entretenu plus haut ; ce sont des guérisseurs qui se réclament du catholicisme, invoquent la Vierge et utilisent des plantes pays associées à de l’exorcisme ou à du magnétisme et qu’en créole, on appelle : « siguideur », « manipulateur », « devineur ».C’est là que les bois de senteur font leur apparition dans l’arsenal thérapeutique ; le bois de senteur blanc, le bois de senteur bleu puis le petit bois de senteur considérés comme des plantes magiques (senteur étant la déformation de chanteur, qui provient lui-même du mot enchanteur), vont être employés à toutes les sauces, dans toutes les tisanes, car ils sont supposés guérir tous les maux et les malades imaginaires. En un demi siècle à peine nos réserves naturelles furent pillées et ces espèces menacées d’extinction, durent être protégées par un arrêté ministériel du 8 Février 1987. Leur sauvetage est désormais assuré, mais seulement dans des jardins privés, car tous les essais de plantation dans leur milieu naturel n’ont pas réussi et c’est vraiment dommage ! Les quelques spécimens qui restent dans la nature sont abandonnés à leur propre sort à cause d’une mauvaise interprétation du mot protégé qui est faite par ceux qui ont la mission de conserver ce patrimoine unique. Pour eux, protéger = ne pas toucher ; pour nous protéger =entretenir, greffer, marcotter, semer et réprimer sévèrement les braconnages.
Arrive l’exposition universelle de Paris de 1900.La Chambre de Commerce confie à B. Duchemann de présenter les plantes les plus efficaces utilisées dans le but d’attirer l’attention des scientifiques de la métropole. Son travail fut édité en un petit livre qui eut un grand succès à l’époque, quatre éditions en 1901 ! Il inspira des vocations dans les zones à forte concentration de population ; ainsi va naître un nouveau genre de simple. Ce n’est plus la tradition, mais on se sert de ce livre comme d’une pharmacopée tout en achetant les plantes avec des fournisseurs plus ou moins sérieux. Résultat, une foule d’erreurs de communication, de confusions de noms qui vont arriver jusqu’à nous par le biais d’enquêtes ethnobotaniques qui font office de guides de santé et sont la cause d’erreurs regrettables.
Le père Raimbault s’installe à Saint-Bernard, la Montagne en 1935. Ce scientifique qui a une parfaite connaissance des plantes tropicales va soigner ses malades, tant en clientèle qu’en milieu hospitalier, avec des plantes pays. Il fera ainsi de véritables essais cliniques, les seuls dans l’île jusqu’à ce jour. Dommage qu’une grosse partie de ses fiches aie été emportée par un cyclone .Les notes restantes nous ont confirmé les activités thérapeutiques de plantes comme : ambaville, bois de reinette, quivi, liane jaune, bois maigre, bois cassant, faham.
La médecine populaire réunionnaise arrivera à son apogée pendant la guerre 39-44. La Réunion, alors coupée de tout ravitaillement, doit se suffire à elle-même. Par la force des choses, les pharmacies vont se mettre aux plantes pays. J’étais adolescent à cette époque et je peux vous affirmer que nous avons absorbé un peu de tout, des plantes du jardin comme des plantes achetées avec un marchand ambulant de tisanes. Dans les cas graves, seulement, on faisait appel à un médecin que l’on payait lors du règlement de la canne ou de la vente du petit porc tire-lire. Une seule exception ! Les typhoïdes étaient traitées par un certain Bébé Lauret auquel le médecin lui-même faisait appel pour administrer au malade des tisanes pays à base de : bois amer, bois de pintade, bois jaune etc .
Le déclin de cette médecine empirique va sonner rapidement avec la départementalisation. Adieu les tisanes familiales ! Tout le monde comme l’on dit « tire un bon d’AMG pour avoir des médicaments de dehors ». Quels médicaments ? De rares spécialités pharmaceutiques et beaucoup de préparations : sirops, potions, pilules, liniments, gouttes pour la plupart préparées à partir d’extraits de plantes. C’était déjà un progrès, une première étape vers le modernisme, qui va d’ailleurs vite arriver ;car de 50 préparations par jour dans mon officine en 1951 on va passer à 10 dans les années 1960 pour diminuer encore au fur et à mesure de l’arrivée de nouvelles spécialités pharmaceutiques. Un véritable ras de marée du aux progrès fulgurants de la médecine et de l’industrie chimique. C’est le règne de la chimie triomphante qui provoquera vite des effets iatrogènes, des intolérances, des incompatibilités et aussi un ras le bol des malades doublé d’un timide retour en grâce des plantes ou plus exactement des médecines dites douces : homéopathie, gemmothérapie, phytothérapie, aromathérapie.
Quelques industriels vont sortir de nouveaux extraits de plantes, à priori plus fiables que les anciens ; mais cette petite embellie ne va pas durer, un arrêté couperet de juillet 1992 mettra fin au remboursement des préparations à base de plantes. Un véritable désastre, la création d’une médecine à deux vitesses : l’une pour les riches et l’autre pour les pauvres. Les pharmaciens lâchent prise et le créneau vacant est vite occupé par un circuit parallèle dynamique, qui, bénéficiant d’une législation floue, va se développer considérablement.
La situation va encore se compliquer avec le non remboursement ou le déremboursement progressif des spécialités à base de plantes. Les grands laboratoires ne s’intéressent plus qu’aux molécules qu’ils isolent, synthétisent puis copient à souhait. Le modernisme a eu raison de la phytothérapie qui jusqu’à ce jour, ne s’est pas encore relevée, malgré les quelques soubresauts qu’elle connaît de temps en temps. Le récent arrêté du 20 avril 2007 vient d’instituer le déremboursement systématique des préparations magistrales à base de plantes ou de préparations de plantes et, s’il était maintenu, ce serait l’arrêt de mort de la phytothérapie.
Pendant ce temps là les plantes pays, elles, sont restées ce qu’elles étaient en 1947. Elles sont encore utilisées dans certaines familles qui ont perpétré les vieilles traditions, mais uniquement avec des plantes de leur jardin ou des alentours. Ce qui constitue une automédication raisonnée qui n’est pas incompatible avec la médecine officielle. Les simples, eux, sont toujours là ; Ces hommes et ces femmes pour qui j’ai un profond respect et une grande admiration, travaillent dans l’ombre avec beaucoup de dévouement et de générosité, le plus souvent bénévolement. Les plus connus ne trouvent pas de successeur. Modernisme oblige, les jeunes sont plus attirés vers d’autres horizons plus prometteurs. Les vrais, les purs empiriques sont donc une espèce en voie de disparition et à cause de sa définition même on ne pourra jamais former un empirique, que ce soit dans une école ou par le biais d’une association, soutenue par des scientifiques et disposant de fonds publics importants.
Cette médecine populaire dont je viens de vous parler n’a rien de commun avec ce qu’on vous propose en ce moment sur les marchés dans les foires et aux abords, pour ne pas dire dans les sites touristiques même, avec une publicité agressive et irréaliste qui frise la mégalomanie. Dans un article publié dans un quotidien local un de ces fanatiques va jusqu’à proposer de remplacer les médicaments, qui dit-il, sont pour la plupart des médicaments de confort par des tisanes. La belle affaire ! Je vais me servir très opportunément de cette phrase pour conclure sur l’avenir de nos plantes pays.
Depuis des générations et des générations les praticiens ont constaté que les plantes sauf exceptions, qu’elles soient utilisées fraîches ou sèches, ont une concentration très faible en principes actifs et qu’il fallait, si l’on voulait obtenir des résultats, absorber des litres et des litres de tisane. On a donc logiquement cherché à obtenir des préparations plus concentrées. Ce qui a conduit aux extraits fluides, mous, secs, puis à la molécule active. Ce stade a été depuis longtemps dépassé par l’arrivée des molécules de synthèse : c’est çà le progrès ! Les tisanes sont dépassées, c’est inéluctable. Elles restent complémentaires d’un traitement .Elles ne peuvent être prises qu’à la maison. On ne peut les emporter à son travail, dans ses voyages, dans ses loisirs ; de plus elles ne sont pas remboursées et les Réunionnais comme les Français en général, restent farouchement attachés à la prise en charge de leurs traitements et aussi au contrôle des professionnels de santé qui les suivent. Pour ce qu’il s’agit des plantes pays, il faut savoir qu’aucune d’entre elles n’a pu être inscrite à la Pharmacopée Française jusqu’à ce jour, car leurs propriétés thérapeutiques n’ont pas encore été prouvées par des recherches chimiques et des essais pharmacologiques et cliniques. Il faut notamment s’assurer de leur innocuité et déterminer les doses utiles, les doses maxima, les doses mortelles s’il y a lieu et la durée du traitement. C’est un travail qui peut durer des années mais qu’il faut absolument faire car il s’agit avant toute chose de la Santé de toute une population. La vente de ces plantes est donc libre et le danger est là, car ce sont des médicaments et les médicaments ne doivent pas se vendre sur les trottoirs, ni sur les marchés ni même dans les foires ; ils ne se dégustent pas non plus dans des bars ni aux abords des sites touristiques
Vous m’avez donc bien compris. Je ne suis pas contre les plantes pays ni contre les empiriques ou simples qui les dispensent. Comme tous les réunionnais, je reste attaché au système de santé européen, scientifique et moderne que tout le monde nous envie. Je dis :
Oui aux plantes pays mais dans le cadre d’une automédication raisonnée et contrôlée par des professionnels de santé : médecins, pharmaciens, infirmiers, préparateurs en pharmacie, kinésithérapeutes etc. Il ne devrait pas avoir d’exception réunionnaise dans ledomaine de la Santé.
DEUXIÈME PARTIE
Parcours particulier de quelques plantes
J’ai retenu environ 100 plantes. Parmi elles 40 sont ou toxiques ou passées de mode, ou protégées. Sur les 60 qui restent 30 vont nécessiter des analyses complémentaires, les 30 autres peuvent être considérées comme ayant un intérêt thérapeutique certain. J’ai sélectionné pour vous quelques unes d’entre elles.
L’ AMBAVILLE
Hubertia ambavilla var. ambavilla, famille des Composées
A tout seigneur tout honneur ! C’est notre plante vedette, une endémique spécifique de notre île, l’exemple idéal qui prouve la grande valeur de nos empiriques, car ses usages traditionnels ont été attestés par des travaux scientifiques récents. Son nom est d’origine malgache : anzavida, signifie : plantes des hauts. L’ambaville a été vraisemblablement utilisée dès le début du XVIII° siècle pour ses propriétés anti-inflammatoires et anti-ulcéreuses tant en usage externe qu’interne : ulcères de l’estomac, lavages des plaies et en bains ou compresses contre les bobos divers des bébés, les eczémas et même la gale.
En 1973 les laboratoires Roger Bellon ont isolé le principe actif : un polysaccharide, qui dans le milieu acide de l’estomac se transforme en une lactone qui neutralise l’excès d’acidité gastrique et permet la cicatrisation des plaques ulcéreuses La lactone a été ensuite synthétisée et fait l’objet d’une demande de brevet qui n’a jamais été exploitée. Désormais on n’aura donc plus besoin de la plante. L’ambaville n’est toujours pas inscrite à la Pharmacopée Française. Son dossier est à l’étude depuis 3 ans. C’est la triste réalité qui nous donne le temps d’assurer la pérennité de cette plante avant de faire sa promotion. La route est longue, voyez vous, pour parvenir à faire valider une plante.
L’ALOES
Aloe borbonica, famille des Liliacées
Dès 1654 Antoine Thoreau dit Couillard, va récolter de l’aloès dans l’île. Les premiers colons arrivés après 1655 disent que l’aloès est partout sans cultiver. Un édit du Roi du 15 Janvier 1687 autorise les colons à faire de l’aloys excepté dans les caz du roy. Et sans franchir la ravine Saint-Gilles. En 1701 un médecin italien, Giovani Borghési, qui accompagne le légat du pape, relate dans ses notes de voyage, qu’il a vu l’aloès, le décrit et vante sa qualité « égale si ce n’est meilleure que l’aloès de Socotra, réputé le meilleur du monde ». Cet aloès est vendu sur le marché de Londres après avoir transité par Bombay. D’où nous vient certainement son nom vernaculaire créole de mazembron.Mazembron est issu de musssumbrum en dialecte Télinga( tribu du sud de l’Inde) ; mussubrum provenant lui-même de l’arabe mussaber( saber= la plante et mussaber le suc cristallisé). L’exploitation ne va pas durer, probablement à cause d’une surexploitation et des défrichages intensifs en vue de la culture du café. La plante a disparu du paysage et aussi des mémoires ; les botanistes en lui donnant un autre nom de genre (Lomatophyllum) n’ont pas arrangé les choses et il ne restera plus dans l’île qu’une autre espèce qui héritera du nom de mazembron marron, le bien nommé, car lui, il n’a pas de suc visqueux, donc pas de drogue. De Cordemoy en 1893 dans sa Flore signale la présence du vrai mazembron ou aloès de Bourbon au Grand-Bassin et au Brûlé de Saint-Paul. Peine perdue ! La Flore des Mascareignes ne va parler que du marron (macrum). Il faut attendre la fin du XX° siècle et L’APN pour retrouver dans le cirque de Mafate un exemplaire de la taille d’un gros choka, avec des feuilles ayant une bordure rose et contenant un suc jaune, visqueux et amer, qui après dessiccation donne une drogue à tous les points semblable à l’aloès officinal. J’ai ensuite apporté la preuve définitive qu’il s’agissait bien d’un aloès en faisant analyser une petite récolte que j’ai faite dans mon jardin. Résultat : présence de 3, 55% de dérivés anthracéniques titrés en barbaloïne, le principe actif de l’aloès officinal. Nous avons donc bien une plante endémique de plus dans notre flore. L’Aloe borbonicum est retrouvé et désormais présent dans plusieurs jardins réunionnais et c’est un élément important de notre patrimoine, qu’il ne faut pas bouder et surtout pas confondre avec l’ Aloe purpureum mauricien.
LE BENJOIN
Terminalia bentzoe, famille de Combrétacées
En1667 François Martin dit que la gomme récoltée à Bourbon, que quelques uns croient être du benjoin, n’est qu’une gomme ordinaire qui donne un peu d’odeur en la mettant au feu, mais qui ne peut servir à rien. Pourtant on va tout de même la récolter, puisque le docteur Borghési en 1701va trouver de l’excellent benjoin en grande quantité. On finit cependant par comprendre que ce n’était pas le vrai benjoin, qui lui, ne pousse qu’au Tonkin et au Laos. Les arbres furent ensuite abattus pour leur écorce qui était exportée pour les tannages. Localement cette écorce sera utilisée en tisanes pour les diarrhées et les catarrhes pulmonaires ; actuellement le benjoin reste la plante incontournable des tisanes refroidissement et des gargarismes pour les maux de gorge et les angines. Attention ! En usage interne et à cause de sa richesse en tanins l’écorce de benjoin peut provoquer des troubles gastro-intestinaux : ballonnements, constipation..
Le TAKAMAKA des HAUTS
Calophyllum tacamahaca, famille des Guttifères
On a aussi découvert dans l’île un arbre très haut et très droit qui fournit un baume verdâtre ; liquide ressemblant aux tacamaques que l’on trouvait en Europe : le baume vert de marie, extrait de Calophyllum mariae et le baume vert des Indes Orientales, extrait de Calophyllum inophyllum. On le baptisa : baume vert de Bourbon ou tacamaque de Bourbon. Le docteur Macé Chirurgien-major de l’île s’en servait contre les ulcères. Cet usage est aujourd’hui abandonné. Par contre on utilise l’écorce comme cicatrisant et les feuilles comme veinotonique genre Ginkgo biloba. Le Père Raimbault lui, avait utilisé l’huile extraite des graines du Calophyllum inophyllum connu sous le nom de takamaka des bas, une plante exotique, pour fabriquer un ester éthylique : le Dolno, contre sciatique et polynévrite.
Le CAFÉ
Coffea arabica var. laurina, famille des Rubiacées
En 1711 le café sauvage fut découvert, mais la Compagnie de Indes va introduire le café de Moka et interdire la plantation du café pays disons plutôt des cafés ; car en réalité il y en avait bien deux que l’on a toujours confondus, qui poussaient côte à côte : le café marron aux fruits de couleur pourpre à maturité et l’ancêtre du café pointu, dont les fruits sont rouges à maturité. J’ai de sérieux arguments historiques pour prouver ce que je dis, les témoignages de d’Hardincourt et du Père Gaubil, les notes de Monsieur De Commerson, les expériences du célèbre botaniste Antoine De Jussieu et en plus, des spécimens sauvages découverts dans des sites difficiles d’accès où l’homme n’a pas pu les planter.
Les résultats obtenus avec la première souche sauvage, appelée ti canot, que nous avons expérimentée, sont excellents. Tableau. L’échantillon , comme vous pouvez le constater est considéré comme le meilleur de tous ceux de la Réunion testés jusqu’à ce jour,et est classé le deuxième du monde, après le Bourbon rouge Alti Plano du Guatémala et avant le Blue Mountain. Cela se passe de commentaires. Nous fondons aussi de gros espoirs sur la souche numéro 2 que voici :
Les cafés pointus actuels sont des arabicas et non des Bourbon comme on veut nous le faire croire. Il y a six variétés d’arabica qui logiquement doivent avoir les chromosomes arabica. Le pointu est un arabica et ce n’est pas parce qu’il a des chromosomes arabica, qu’il est un Bourbon. Il est son frère et non son fils.
Le LINGUE POIVRE
Piper borbonense, famille des Pipéracées
Les habitants le prirent pour le poivre cubèbe ou poivre à queue ; ils déchantèrent vite car c’était un faux poivre, d’où le nom de lingue qui signifie faux en malgache. Actuellement il est considéré comme un rafraîchissant idéal utilisé dans les tisanes pour enfants et pour adultes ; Il soigne aussi l’acné juvénile tant en usage externe qu’interne.
Le CROC de CHIEN
Smilax anceps, famille des Liliacées
Connu dès le début du peuplement de l’île sous le nom d’esquine, a été utilisé comme son cousin la salsepareille officinale comme diurétique et dépuratif dans les cas de maladies de la peau et contre les maladies vénériennes. Très riche en saponines, n’est plus guère utilisée. La plante s’appelle aussi : liane panier, parce que ses tiges servent à fabriquer des paniers. Le croc de chien a fait partie de la formule du sirop Brunet, un sirop dépuratif élaboré par un pharmacien de Saint-Paul : Denis Ferrand, des années 1940-1950.Ce sirop était composé entre autres de : sourichaude, fumeterre, lingue poivre, ti carambole, guérit-vite, faham.
Le MAFATAMBOA
Gnetis glabra, famille des Connaracées
Un nom d’origine malgache qui signifie : qui tue les chiens ; c’est un poison que les malgaches ont repéré très vite. Les marrons l’utilisaient pour tuer les chiens des chasseurs d’esclaves qui les recherchaient. Peu connu mais bien présent dans nos forêts. La molécule active n’est pas connue mais on sait que l’empoisonnement est lent et douloureux, le chien hurle à la mort longtemps avant de mourir.
Le JOLI COEUR
Pittosporum senaçia variétés senaçia et reticulatum, famille des Pittosporacées
Utilisé depuis la première moitié du XVIII°siècle comme vulnéraire c-à-d en applications sur la peau puis contre les maladies vénériennes ; ce qui était parfaitement normal pour l’époque, la plante étant très riches en saponines. On ne peut pas en dire de même des usages proposés par les soit- disants tisaneurs du XX° et du début du XXI° siècle. Lorsque certains d’entre eux disent : « lé bon pou le cœur ! » on se croirait au moyen âge. Les propriétés médicinales d’une plante ne sont pas déterminées par la forme, la couleur ou le goût. Et puis il y a la série des indications les plus invraisemblables et même dangereuses, car le joli cœur est riche en saponines qui détruisent les globules rouges ; je cite les usages proposés : contre l’hypertension, le diabète, les refroidissements, les insuffisances hépatiques. Les usages contre l’acné et le vitiligo sont plus logiques mais devront être limités à la voie interne à cause des saponines. En vertu du principe de précaution, il vaudrait mieux suivre ce conseil, car dans l’euphorie générale de cette époque n’importe qui vous propose n’importe quoi et vous le fait avaler sous prétexte que c’est un « zerbage péi ». En conclusion vous pouvez remarquer que les empiriques du début du XVIII°siècle étaient beaucoup plus près de la vérité que les tisaneurs marrons du XX°
Le QUINQUINA de BOURBON
Ochrosia borbonica, famille des Apocynacées
Plus connu sous le nom de bois jaune, utilisé dès le début du XVII° siècle comme vermifuge puis comme tonique et fébrifuge. Son usage est freiné par sa rareté ; c’est une plante protégée par l’arrêté ministériel du 8 février 1987 qui interdit la récolte, le transport, la vente et la consommation des spécimens sauvages. Les spécimens existant dans les jardins privés ne sont donc pas concernés par cet arrêté. La plante entière contient des alcaloïdes qu’il faudrait identifier.
Le PATTE POULE
Vepris lanceolata, famille des Rutacées
Autre nom vernaculaire : bois de Saint-Leu
Ainsi nommé à cause de ses feuilles dont les trois folioles sont disposées comme les doigts d’une patte de poule ; connu dès le XVIII°siècle pour ses propriétés vulnéraires genre arnica Utilisé actuellement en usage interne contre les douleurs rhumatismales et grippales et en usage externe contre contusions, entorses, foulures, traumatismes divers. Souvent confondu et remplacé par ses homonymes qui ont eux aussi les feuilles en forme de patte de poule : le gros patte poule et le patte poule piquant ou liane patte poule. Attention ne jamais prendre du patte poule piquant en usage interne car il contient un alcaloïde : la toddaline, qui est un toxique neuromusculaire dangereux pour le cœur. Ce patte poule piquant se distingue facilement par la présence d’épines sur les tiges.
Le GOYAVE MARRON
Aphloia theiformis famille des Flacourtiacées
Autres noms vernaculaires : fondamane, change écorce
Une autre plante très connue des malgaches, dont on utilise les feuilles pour leurs propriétés diurétiques et veinotoniques. Le goyave marron n’est pas fébrifuge ; il a seulement été utilisé en association avec la quinine, dans le traitement du paludisme pour ses propriétés diurétiques et protectrices des globules rouges
Spécialités pharmaceutiques à base de goyave marron : l’Aploïne P, pour la circulation veineuse, retirée du marché. Le Canol, diurétique encore en vente dans les pharmacies.
Le goyave marron est toujours utilisé localement comme tisane rafraîchissante surtout. C’est une plante qui pourrait être commercialisée facilement, à condition de fournir une plante de qualité.
La ROSE AMÈRE
Cataranthus roseus, famille des Apocynacées
Autre nom vernaculaire : pervenche de Madagascar
Encore une plante d’origine malgache probablement arrivée chez nous avant l’installation de l’homme. A cette époque les ouvriers malgaches mâchaient les feuilles pour calmer leur faim.
C’est une plante aux multiples usages. Les racines sont utilisées contre l’hypertension. La plante entière ou les tiges feuillées sont utilisées en usage interne contre le diabète et les insuffisances hépatiques et en usage externe pour laver les plaies.
En recherchant les molécules antidiabétiques des chercheurs canadiens ont découvert deux alcaloïdes anticancéreux : la vinblastine (maladie de Hogkin), la vincristine (leucémie) qui ont été exploités en spécialités pharmaceutiques : Velbé, Oncovin.
Le COCHLEARIA
Centella asiatica, famille des Ombellifères
Autres noms vernaculaires : violette marron à la Réunion, herbe aux tigres
Plante connue dans le monde entier pour ses propriétés anti-inflammatoires et cicatrisantes. Un extrait de la plante à été commercialisé en France sous le nom de Madécassol : pommade et poudre cicatrisantes, ampoules contre la cellulite.
Localement les feuilles sont utilisées contre les ulcères d’estomac et en gargarismes contre les aphtes.
Le BOIS de PÊCHE MARRON
Psiloxylon mauritianum, famille des Myrtacées
Autres noms vernaculaires : bois à gratter, sans écorce, biguignan (docteur H.Leclerc), bois bigayon à Maurice.
C’est un mauricien, monsieur Bigayon qui fit parvenir cette plante au docteur Henri Leclerc connu en France comme le père de la nouvelle Phytothérapie. Les résultats des essais cliniques faits dans les Hôpitaux de Paris dans les années 1930, furent publiés dans les revues médicales de l’époque. Dans son livre, Guérir par les Plantes, il attribue au bois de pêche marron des propriétés diurétiques, antispasmodiques et antiseptiques légères et lui donne le nom de biguignan. Avant la guerre 39-44 il existait en France une spécialité à base de biguignan : l’Albucoli qui a disparu pendant la guerre, faute d’approvisionnement. A la Réunion jusqu’alors on avait utilisé l’écorce contre les diarrhées et les feuilles n’étaient connues que par un seul simple qui les utilisaient et les utilisent encore contre la goutte et l’excès de cholestérol, sous le nom de pêche rose.
Le bois de pêche marron est pour moi une plante d’avenir à condition de la planter avant toute exploitation. Attention à nos apprentis sorciers qui pourraient en quelques années épuiser nos réserves naturelles.
L’APN s’est déjà mise au travail pour domestiquer cette plante et maîtrise parfaitement la germination de ses graines. Il existe de beaux spécimens dans les jardins de quelques uns de ses membres.
Le MAPOU
Monimia rotundifolia, famille des Monimiacées
Il ne s’agit pas là du mapou ou bois de rempart qui lui, était connu dès les origines du peuplement, mais d’un autre arbre endémique aussi toxique, qui pousse en moyenne altitude, a de grosses feuilles rondes et un bois imputrescible et ininflammable. Ce n’est pas une plante médicinale, mais les Laboratoires Roger Bellon en ont extrait un alcaloïde anti- arythmique cardiaque qu’ils ont breveté, synthétisé et exploité peu après sous forme de spécialités pharmaceutiques. La plante n’est donc plus nécessaire, ce qui est de plus en plus fréquent de nos jours. La molécule toxique est la laurotétanine dont les signes d’empoisonnement sont analogues à ceux des crises de tétanos ; à la Réunion on dit qu’une feuille « y tue un bœuf ». Le bois a été utilisé pour fabriquer des linteaux de cheminées.
Le BOIS de QUIVI
Turreae casimiriana, famille des Méliacées
En malgache, quivi c’est l’équivalent du marron chez les blancs, en effet le nom de quivi fut donné aux colons rebelles qui se réfugiaient dans les bois lors du passage des encaisseurs de la Compagnie ; quivi donna quivisa, le premier nom de genre de la plante ; ensuite les femmes malgaches qui tombaient enceintes de leur patron l’utilisèrent avec succès pour avorter. Le père Raimbault va l’adopter pour soigner l’hypertension. En médecine populaire la plante est connue pour ses propriétés emménagogues et veinotoniques. Les études chimiques et pharmacologiques réalisées par les la Laboratoires Roger Bellon ont décelé la présence de catéchines ayant une forte activité vitaminique P(veinotonique) ; ce qui m’autorise une fois de plus à dire que l’empirisme réunionnais est tombé dans le mille une fois de plus.
Le BOIS d’EFFORT
Olax psittacorum, famille des Oléacacées
Je me suis toujours demandé comment une plante qui contenait une molécule laxative, pouvait être utilisée contre les douleurs provoquées par des efforts . Le mystère fut vite éclairci lorsqu’un simple connu, fit devant moi un geste de la main évocateur, tout en me disant « mi donne a lu pou la tension, y relaxe ! » ; traduisez relâche et vous aurez tous compris qu’en prenant du bois d’effort on ne fait plus d’effort pour aller à la selle. Le créole est toujours très imagé. Il faut savoir qu’auparavant on traitait l’hypertension avec des laxatifs et purgatifs qui, en faisant éliminer, permettaient de diminuer la masse sanguine. De là à utiliser cette plante comme relaxant, comme mon ami cité plus haut le fait, il y a un grand pas à franchir. Par contre il est fort possible, qu’un laxatif puissant, puisse en éliminant les déchets : l’acide lactique notamment, servir de dérivatif.
Le BOIS de FLEURS JAUNES
Hypericum lanceolatum, famille des Guttifères
Cousin du millepertuis, très connu dans l’île pour ses propriétés diurétiques et veinotoniques, surtout utilisé en tisanes rafraîchissantes. Ces propriétés médicinales peuvent être prouvées par la présence de flavonoïdes (rutine, quercitine) dans la plante. Je suis plus réservé sur l’action anti stress et antidépressive que certains lui attribuent, peut-être à tort et ceci à cause de sa parenté avec le millepertuis. Il faudrait donc faire des analyses chimiques pour rechercher la molécule active. Si cette molécule existe, alors il faudra lui appliquer la même réglementation que celle du millepertuis c-à-d : interdiction de vente. Pour votre information le millepertuis contient une molécule qui annihile l’action de quelques médicaments comme : la digoxine, les anticoagulants, la céphalosporine et les pilules.
Le BOIS d’OSTO
Antirhea borbonica, famille des Rubiacées
Son bois servait à faire des maisons, d’où le nom d’osto. Riche en tanins et flavonoïdes ses feuilles et son écorce sont très utilisées en médecine populaire. « Un tisane l’osto y réveille un mort » disait ma grand-mère qui en donnait une tasse le matin à ceux qui avaient trop bu la veille.
En usage externe les décoctions d’osto servent à laver les plaies : action cicatrisante
En usage interne : astringent, contre diabète, hypercholestérolémie et diarrhées.
Cette plante qui n’est pas toxique mériterait des études plus poussées pour prouver ces propriétés médicinales.
Le BOIS de REINETTE
Dodoneae viscosa, famille des Sapindacées
Il y a en réalité des bois de reinette qui se distinguent par la taille, la forme des feuilles et par l’arôme qui se dégage de ces feuilles.
Bois de reinette des hauts : grosses feuilles, pas d’odeur
Bois de reinette des bas : feuilles allongées et fines ayant une odeur caractéristique de pomme : le bois de reinette boucan
Il existe aussi une variété intermédiaire aux feuilles odorantes : le bois de reinette Mafate
Ces bois de reinette ont été utilisés depuis le XVIII° comme anti-inflammatoire et dans les cas de rhumatismes. Au XIX° siècle, dans la région de Saint-Gilles on en faisait des liqueurs aromatiques très appréciées. Le père Raimbault s’en est servi contre les rhumatismes et la goutte. Très utilisée à l’heure actuelle, ses propriétés diurétiques anti-inflammatoires sont prouvées par la présence de flavonoïdes (quercitol et isorhamnétol en grandes quantités), de saponosides et de proanthocyanidols. Les feuilles mûres des variétés odorantes sont très appréciées en tisanes de confort aromatiques, rafraîchissantes et éliminatrices des déchets.
La SOURICHAUDE
Viscum triflorum, famille des Loranthacées
C’est notre gui pays, une plante parasite qui pousse sur certains arbres de nos forêts des hauts, considérée comme une plante rafraîchissante, utilisée dans les tisanes tambave, sans jamais se poser la question de savoir si le gui utilisé est toxique ou non ; et pourtant, il faut bel et bien admettre que notre gui pays, cueilli sur certains arbres peut être toxique comme le gui officinal. Le gui vendu sur les marchés ou livrés à ceux qui préparent des tisanes n’offrent aucune garantie de sécurité et cela est très grave lorsqu’il s’agit souvent de la santé de bébés déjà très affaiblis.
La sourichaude est aussi utilisée contre l’hypertension et la mauvaise circulation veineuse. Au XXI° siècle dans un pays qui bénéficie d’un système de santé moderne et performant il est surprenant de trouver sur les marchés des tisanes composées pour le diabète, l’hypertension, les rhumatismes, la circulation etc…qui contiennent toutes de la sourichaude. Cela parce que dit-on c’est une plante qui guérit tous les maux et les maladies imaginaires. Mais je vais donner le coup de grâce à cette plante en citant un de mes Maîtres : le Professeur Loïc Girre, Professeur de Pharmacognosie de la Faculté de Pharmacie de Rennes « le gui est une plante qui doit être réservée aux spécialités pharmaceutiques » ; cela veut dire clairement qu’il ne faut pas prendre de tisanes à base de gui car il y a trop de risques, et ce qui est valable pour le gui officinal devrait l’être pour notre sourichaude.
Je citerai pour terminer quelques plantes pays qui pourraient avoir un avenir
Bois de Judas : asthme
Bois de tension : hypertension
Liane zig- zag : asthme
Bois de raisin veinotonique
Branle vert : anti-ulcéreux
Bois de perroquet : tonique
Bois de sable : diabète, hypercholestérolémie
Bois blanc rouge : veinotonique
Bois de fièvre : fébrifuge
Liane jaune : anti-ulcéreuse
Bois maigre : diurétique
Poivrier des hauts : anesthésique
Notre patrimoine est riche mais fragile. Avant de faire la promotion d’une plante quelconque il faudrait exiger des promoteurs qu’ils la plantent pour assurer sa pérennité ; et en terminant je répéterai encore une fois : les plantes pays oui ! Mais dans le cadre d’une automédication contrôlée et en harmonie avec le système de santé officiel. Médecine familiale, oui ! Mais dès qu’il y a commerce, le consommateur est en droit d’exiger : qualité, innocuité, fiabilité, efficacité et aussi compétence du vendeur, car ce sont des médicaments à part entière.
TABLEAUX
De 1665 à 1848
Aloès de Bourbon : laxatif
Ambaville : anti- ulcéreux, anti-inflammatoire et cicatrisant
Benjoin : grippe, angine
Bois amer : usage abandonné, protégé
Bois cassant : Digestif, veinotonique
Bois de chandelle : astringent
Bois de fer bâtard : usage abandonné
Bois de joli cœur : dangereux, en usage externe seulement contre acné et autres maladies de la peau.
Bois maigre : diurétique élimine les déchets
Bois de nèfles : anti-inflammatoire
Bois de reinette : anti-inflammatoire, diurétique, antirhumatismal
Bois de rempart : toxique
Bois rouge : toxique
Bois de sureau : anti-inflammatoire et diurétique, usage abandonné
Bois de tambour : abortif, toxique
Cochléaria : anti-inflammatoire, cicatrisant
Esquine ou croc de chien : sudorifique, dépuratif
Faham : grippe
Goyave marron : diurétique, veinotonique
Liane jaune : anti-ulcéreux, cicatrisant
Liane sans feuilles : toxique usage abandonné
Lingue poivre : rafraîchissant
Mafatamboa : toxique
Mahot : astringent, usage abandonné
Patte poule : vulnéraire,
Patte poule piquant : toxique, à n’utiliser qu’en usage externe
Quivi : veinotonique, hypotenseur, emménagogue
Rose amère : hypertension, diabète, alcaloïdes anticancéreux
Takamaka : feuilles = veinotonique, écorce = cicatrisant
De 1848 à 1948
Affouche rouge : usage abandonné
Bois blanc rouge : veinotonique
Bois de cabri blanc : usage abandonné, astringent
Bois de Charles : astringent, dépuratif, usage abandonné
Bois de demoiselle : emménagogue
Bois de fer blanc : anti-inflammatoire, diurétique
Bois de gaulette : anti-inflammatoire, diurétique et dépuratif
Bois de maman : abortif, toxique
Bois de merle : Usage abandonné, toxique à cause des hétérosides cyanogénétiques.
Bois de négresse : veinotonique
Bois d’olive blanc : diurétique, hypocholestérolémiant léger.
Bois d’osto : astringent, diarrhées, diabète, ulcères de l’estomac, hypercholestérolémie
Bois de pintade : fébrifuge ? Usage abandonné
Bois de prune : usage abandonné
Bois puant : grippe, protégé
Bois de punaise : usage abandonné
Bois de rongue : antispasmodique genre aubier de tilleul
Bois de savon : rafraîchissant, anti-hémorroïdaire
Bois de senteur blanc : magique, protégé
Bois de senteur bleu : magique, protégé
Bois de senteur (petit) : magique, protégé
Bois de sinte : confondu avec la ronce patte poule
Bois de source : usage abandonné
Catafaye : confondu avec le patte poule
Fanjan : diabète
Foulsapate : adoucissant, béchique, usage abandonné
Ficus blanc : usage abandonné, emménagogue ?
Foutafoute : circulation, lavages des plaies
Liane de clé : tonique, aphrodisiaque ? Protégé
Liane de lait : caustique, usage externe contre verrues ?
Liane Montbrun : confondue avec la liane savon, protégé
Liane savon : anti-inflammatoire et rafraîchissant
Liane zig zag : asthme
Lingue café : anti-inflammatoire, rafraîchissant
Poivrier des hauts : usage abandonné, anesthésique ? protégé
Quinquina pays : fébrifuge ?
Ronce blanche : astringent, diabète, angines
Sourichaude : circulation, guérit tous les maux ?
Tan Georges : usage abandonné, astringent ?
Ti carambole : adoucissant, anti-inflammatoire, usage modéré, obsolète
De1948 à nos jours
Bois d’effort : laxatif
Bois de Judas : anti-asthmatique
Bois d’olive noir : diurétique, hypotenseur, hypocholestérolémiant
Bois d’ortie : antiprurigineux, protégé
Bois de paille en queue : antiprurigineux
Bois de paille en queue : guérit-vite
Bois de pêche marron : diurétique, élimine les déchets
Bois de perroquet : tonique
Bois de raisin : veinotonique
Bois de sable : antidiabétique, hypocholestérolémiant, protégé
Bois de tension : hypotenseur
Branle vert : anti-ulcéreux gastrique
Liane d’olive : anti-inflammatoire, fluidifiant du sang ?
Mangue (ti) : guérit-vite
Mapou : toxique
Natte (ti) : feuilles= veinotonique ?
Natte (grand) : feuilles=veinotonique ?
Quinze questions ont été posées à la fin de cette conférence. J’ai retenu celles qui avaient une relation directe avec le sujet.
I- Le tisaneur
Je n’ai pas cité ce mot pour la raison bien simple que pour moi il mériterait d’être traité à part.
Tisaneur est un néologisme créole qui fait l’amalgame entre quelque professions : exorciste, magnétiseur, guérisseur et quelques petits métiers comme cueilleurs, vendeurs, revendeurs de plantes en passant par une foule d’opportunistes qui ont flairé la bonne affaire et de prêtres, sorciers, gourous, charlatans divers qui n’ont pas la connaissance des plantes et n’ont rien à voir avec les empiriques dont je vous ai parlé. Ces vrais empiriques se comptent sur les doigts d’une main, et devraient être les seuls à mériter le nom de tisaneur, car ils se distinguent nettement des autres. Le tisaneur pourrait être défini comme un homme ou une femme qui soigne uniquement par les plantes, suivant les principes de la médecine scientifique et moderne qui, hormis les cas chirurgicaux, traite par des moyens physiques et naturels. Le mot tisaneur est entré depuis peu dans le langage créole. Ni Chaudenson, ni Benoist( 1980), ni Andoche, n’en parlent. Il apparaît probablement au grand jour, dans l’ouvrage d’ethnobotanique : Tisaneurs et de Roger Lavergne(1990). Depuis il a fait son chemin. Il plait aux touristes et est devenu plutôt folklorique. J’estime que lorsqu’il s’agit de la Santé des gens il faut être sérieux : les plantes sont des médicaments et des médicaments à part entière !
Historique du mot tisaneur
Depuis toujours en créole, tisaner, signifie : droguer, empoisonner ou donner une mauvaise médication. On dit « lu la tisane à ou ». Tisaneur, avait donc un sens plutôt péjoratif. Même actuellement lorsque certaines personnes prononcent ce mot, on peut remarquer qu’ils esquissent un petit sourire ironique. Les intéressés eux-mêmes ne sont pas toujours d’accord. Un vrai empirique que je connais bien me dit souvent : « moin lè un tisaneur de forêt » pour se distinguer des autres. Un autre, qui lui est plutôt magnétiseur « moin lé pas tisaneur, moin lé un manipulateur »Il faudrait donc faire un peu le ménage dans cette profession pour donner définitivement ses lettres de noblesse à l’empirisme réunionnais. On ne doit pas mélanger serviettes et torchons.
II-Tambave
Mot d’origine malgache qui signifie : maladies de la première enfance ou troubles gastro-intestinaux provoqués par la non expulsion de tout ou d’une partie du méconium, puis par l’absorption de mauvais lait par le bébé, que ce soit le lait de la mère ou le lait de vache. Certains vieux médecins que j’ai connus me disaient que ces troubles pouvaient être dus aux mauvaises conditions d’hygiène de l’époque ; et ils n’avaient peut-être pas tout à fait tort car depuis la départementalisation, avec l’arrivée de l’Aide Sociale, de la Sécurité Sociale, de la PMI et des laits maternisés, farines et aliments en petits pots, on ne parle presque plus de tambave. Les nostalgiques qui utilisent ce mot ne savent souvent pas ce que ce mot signifie. Une chose est sure, et il faut le savoir, on n’a pas le tambave à cinq ans !
III-Législation des plantes médicinales
Le monopole de la vente des plantes médicinales est réservé aux pharmaciens. Ils peuvent vendre toutes les plantes médicinales, officinales ou non, indigènes ou exotiques et aussi les plantes toxiques. De plus ils sont les seuls à pouvoir exécuter des préparations, toutes les préparations à base de plantes ou d’extraits de plantes.
Ils peuvent donc préparer des mélanges pour satisfaire une prescription médicale, ou bien à l’avance pour la vente directe au consommateur sous forme de « produits conseil »à condition de respecter la législation en la matière :
Pour les mélanges inscrits à la Pharmacopée ou au formulaire national, pas de problèmes ! Il suffit de mettre le nom de la tisane sur l’étiquette. Ex : espèces pectorales..
Pour les « formules maison », lorsqu’elles sont préparées à l’avance, elles doivent obligatoirement comporter sur le conditionnement :
Le nom et l’adresse de la pharmacie
Le nom et la dose de chacune des substances actives contenues dans le mélange.
Une tisane étiquetée : mélange diabète, par exemple, sans mention de ses composants ou de leurs doses, est considérée comme un « remède secret ». Or les pharmaciens ne peuvent vendre aucun remède secret. Article L569, dernier alinéa du code de la santé publique.
L’article R 5094 du dit code précise : « est considéré comme un remède secret, tout médicament simple ou composé, détenu en vue de la vente, mis en vente ou vendu, alors qu’ont été omises une ou plusieurs mentions obligatoires sur un des éléments du conditionnement.
Les Herboristes
La profession d’herboriste a été créée par la loi de Germinal, sous la tutelle des Ecoles de pharmacie. Cependant les Herboristes diplômés connaissent les plantes mais n’ont pas la connaissance médicale des plantes.
Aux termes de la loi, ils ne peuvent vendre que des plantes indigènes et acclimatées, à l’exception des plantes vénéneuses comme colchique, belladone, digitale etc. Ils ne devraient donc pas vendre du séné, de l’harpagophytum qui sont des plantes exotiques.
Ils peuvent délivrer des mélanges de plantes sèches sur ordonnance médicale. Ils ne peuvent délivrer des mélanges préparés à l’avance, sauf dérogations accordées par arrêté ministériel. Ex : espèces apéritives, digestives, stomachiques, pectorales et vulnéraires.
Le diplôme d’herboriste a été supprimé sous le gouvernement de Pétain : décision du 11 Septembre 1941, validée par l’ordonnance du 23 Mai 1945 incluse dans l’article 659 du code de la santé publique. Plus de 65 ans après, il ne reste plus e France que quelques vieux herboristes et à leur disparition, la profession aura cessé d’exister.
Le circuit libre
Il existe une liste de 34 plantes qui sont en vente libre : bardane, bouillon blanc, bourgeons de pin, bourrache, bruyère, camomille, chiendent, cynorrodon ou églantier, eucalyptus, frêne, gentiane, guimauve, hibiscus ou karkadé, houblon, lavande, lierre terrestre, matricaire, mauve, mélisse, menthe, ményanthe ou trèfle d’eau, olivier, oranger, ortie blanche, pariétaire, pensée sauvage, pétales de rose, queues de cerise, reine des prés ou ulmaire, ronce( feuilles), sureau, tilleul, verveine, violette.
Ces plantes ne peuvent être mélangées entre elles ou à d’autres, à l’exception de tilleul, verveine, camomille, menthe, oranger, cynorrhodon, hibiscus.
Elles sont autorisées à la vente ailleurs que chez le pharmacien et les herboristes. Il convient d’ajouter à cette liste les plantes alimentaires : légumes, fruits, épices et condiments quand elles sont vendues dans un but alimentaire.
On parle d’une prochaine liste de 144 plantes en vente libre, ce qui compliquera encore plus la situation. Tout peut être médicament mais tout peut être poison ; ne l’oublions pas !
Le circuit parallèle
C’est un circuit à part, qui est apparu tout naturellement après l’abandon presque général du créneau herboristerie par les pharmaciens et aussi la quasi disparition des herboristes. Un certain ras le bol des malades pour les traitements chimiques et un engouement pour les médecines dites douces ont grandement contribué à son développement. C’est un circuit dynamique qui a largement profité d’une législation, il faut le dire, assez floue, qui offre toutes sortes de plantes, même les officinales, souvent mélangées et présentées comme des remèdes secrets, ou bien carrément avec la composition du mélange, les doses et les indications thérapeutiques ; ce qui constitue un délit flagrant d’exercice illégal de la médecine et de la pharmacie. Ce qui, je l’ai dit plus haut, est interdit aux herboristes diplômés serait-il autorisé à des vendeurs d’occasion ? Cette question mérite une réponse.
Cas spécial de la Réunion
Nous avons le circuit des pharmacies, le circuit parallèle mais pas d’herboristes. Notre spécificité est le circuit des plantes pays, c-à-d des plantes médicinales utilisées par la médecine populaire réunionnaise : plantes indigènes et endémiques auxquelles s’ajoutent des plantes exotiques qui constituent une pharmacopée populaire issue de l’empirisme. Aucune de ces plantes n’est inscrite à la Pharmacopée Française, leur vente est donc libre. Une liberté à risques, car il y a parmi elles des plantes dangereuses, voire toxiques. Ce sont donc de vrais médicaments qui sont vendus par n’importe qui, n’importe où, souvent mélangés entre eux et présentés sous forme de remède secret. Jusqu’à la fin du XX°siècle tout se passait à peu près normalement et assez discrètement, en bonne harmonie avec la médecine officielle et sans risques pour le consommateur ; tout a changé depuis l’an 2000 avec la brusque apparition d’une génération d’opportunistes qui se sont organisés pour exploiter la situation et surtout profiter de l’ambiquité du mot tisaneur pou établir un véritable circuit de vente de plantes ou zerbages pays. Fabrication de mélanges, vente sur les marchés et dans les foires, dégustations de tisanes sur les sentiers de randonnée, vente sur internet, présence même à la foire de Paris ! La lecture de certains articles de presse et l’écoute d’émissions télé qui sont même rediffusées me laissent pantois et inquiet pour la santé de mes compatriotes.
IV- L’ethnobotanique
C’est la connaissance de l’utilisation des plantes par l’homme, qu’il s’agisse de plantes alimentaires, médicinales ou toxiques.
C’est une science qui consiste donc à réunir des données provenant, tant d’ouvrages anciens, que récoltés sur le terrain auprès de populations disposant d’un savoir ancestral et vivant encore près de la nature.
Commentaire
Cette définition est claire ; à la Réunion il ne peut y avoir de véritable ethnobotanique. Notre empirisme très jeune ; il n’a pas 350 ans et c’est de plus un empirisme spécial, qui est né dans des conditions très particulières, je dirai même, unique au monde, à cause de l’isolement quasi-total de la métropole au début du peuplement, de la présence de plantes spécifiques : les endémiques et surtout de la parfaite connaissance de la nature de nos ancêtres malgaches.
De plus, les enquêtes ethnobotaniques ne peuvent servir de guide de santé, établi, édité et réédité plusieurs fois, sans mise à jour, alors que l’usage des plantes suit tout naturellement la même évolution que la civilisation de l’homme. C’est le cas de notre île, qui, depuis les origines de son peuplement a suivi l’évolution de la médecine et de l’industrie chimique de la France. Les vrais empiriques ont des attaches ancestrales et ils se font très rares. De nos jours il n’y a plus de communication directe entre l’homme et la nature ; tout a radicalement changé ; existe-t-il encore un réunionnais qui se soigne uniquement avec des plantes pays, sans consulter un médecin ?
L’empirisme ne peut donc pas renaître dans les conditions de vie actuelles qui ne lui sont pas favorables.
Sur un plan plus général, l’ethnobotanique est aujourd’hui obsolète. L’étude ethnobotanique a fait place à l’étude scientifique des plantes depuis plus de 30 ans c-à-d : la pharmacognosie et l’ethnobotanique est devenue l’ethnopharmacognosie, la quête des plantes qui guérissent et leur connaissance scientifique. La phase d’enquêtes est suivie de trois autres phases pour confirmer ou infirmer les usages traditionnels.
Phase chimique
On fait des tests chimiques, puis on isole les molécules actives, pour ensuite les synthétiser, voire les copier.
Phase pharmacologique
Se fait en laboratoires, in vitro, sur des animaux. On recherche d’abord la toxicité, pour ensuite étudier l’activité des molécules suivant une procédure classique qui permet de déterminer les doses et le mode d’administration.
Phase clinique
On pourrait se contenter des résultats des enquêtes, mais cela ne suffit pas ; il faut faire des essais en milieu hospitalier ou en clientèle sous le contrôle de médecins spécialisés. Les indications thérapeutiques d’une plante peuvent être alors validées.
Les autres questions qui ont été posées ne concernent pas le sujet de la conférence ; elles ne seront donc pas traitées. Pour mémoire : jamblon, pignon d’Inde, plantes somnifères, accidents provoqués par les plantes. romarin, talc pays, racines raquette.
![]() |
patrimoine - environnement - lo byin - lanvironman - patrimoine - environnement - lo byin - lanvironman - |
||||||||
Voici le texte de la conférence faite dans le cadre des conférences de l'Association des Amis de l'Université le 30 octobre 2007 par Marc Rivière, auteur du livre "Les plantes médicinales à l'île de la Réunion, leurs amis et leurs faux amis" publié par Azalées Editions et 2007 |
|||||||||