L'histoire du café pointu de Bourbon:
trois siècles d'avatars d'une plante endémique réunionnaise
Quelques points de repère :
Arbuste au port très ramifié…de forme pyramidale, ayant 2 mètres de haut (depuis la plantation, le sujet a été étêté plusieurs fois) Marc Rivière, 2006
Au niveau morphologique, elle [la variété] se caractérise par un nanisme… Aurélie Lécolier, 2006
Détail des branchesA gauche, rameau de Bourbon rond coeurs roses, à droite, rameau de pointu de Bourbon. On distingue bien la différence de taille des entre-noeuds [ Photo R.T]
En décembre 2006, des grains de pointu prélevés en forêt par Marc Rivière ont été confiés à la maison Malongo qui en a fait analyser la teneur en caféine. Un rapport du laboratoire en date du 4 décembre 2006, révèle que l’échantillon contenait 8430mg/kg de caféine, soit 0,843
Il en existe deux variétés: l’une dite Café du pays, à graine ovale (dans le commerce on dit café rond), et celle dite Café Leroy, dont le port est différent, à graine allongée (dans le commerce, café pointu). La variété Café du pays possède un arôme supérieur [E. JACOB DE CORDEMOY, Flore de l’île de La Réunion, 1895 pages 506, 507]
"Il a cet inconvénient d’être l’arabica le plus faible en caféine. Pur, il n’a pas de corps, c’est une infusion". Pascal Boutet A.P.C.B.P. [in le Quotidien du 02/10/2006]
A la demande de Marc Rivière, la maison Malongo a procédé à une dégustation comparative du pointu de Bourbon de la souche de grand Bassin , du Bourbon rouge du Guatemala Altiplano et du Blue Montain de Jamaïque. Voici un extrait de la lettre adressée le 3 août 2006 par le Directeur Général de la maison Malongo à Marc Rivière.
« Nous avons bien réceptionné votre échantillon de café vert (lot RM 156) et nous l’avons goûté à deux intervalles différents, le jour de sa torréfaction (cf fiche de dégustation en annexe) et trois jours après.
Ce produit présente la spécificité d’être fin, délicat et très parfumé. Son acidité est moyenne. le corps et l’amertume sont faibles. On note une touche vanille. C’est un produit très singulier. De grande qualité, il est le meilleur échantillon que nous ayons réceptionné à ce jour de la Réunion. »
Suit la fiche technique détaillée. "En note générale, l’ordre est le suivant : Bourbon du Guatemala : 9/9, pointu de Bourbon : 7/9 et Blue Montain : 6/9."
Dans le monde économique, une course de vitesse s’engage. Des associations se créent. Dans un premier temps, les conditions de mise en culture des parcelles d’essai font l’unanimité.
éléments qui vont jouer sur la nouveauté du produit pour rééditer le schéma désormais classique mis en place avec la vanille: une société ayant son port d’attache à la Réunion, bénéficiant éventuellement d’aides économiques de l’Europe, cultive le café à Madagascar et l’envoie à la Réunion sous forme de café vert à des prix défiant toute concurrence. Là, le café, torréfié, moulu et ensaché est mis dans le commerce sous forme de produit à forte plu value. Mais personne n’est au courant de cette initiative jusqu’au moment où paraît le livre de Marc Rivière, La Réunion et le café.
Mais très vite deux tendances se dessinent.
· Il y a ceux qui suivent le CIRAD et son programme (étalé sur cinq ou six ans) de sélection de semences, de conditions optimales de culture, d’étude de rendement, de conditionnement et de prospection de débouchés. Car l’objectif est de négocier au prix fort ce produit original.
· Et puis il y a ceux qui préfèrent jouer leur propre carte.
De.. cette deuxième catégorie.. se dégagent bientôt quelques
Prix imposé et prix vérité
Quel était le prix rêvé, celui qui circulait dans les conversations plus ou moins officielles il y a six ans ? 30 ? 40 ? 50 € le kilo de café vert ? Aujourd’hui, de quel côté qu’on se tourne, le kilo se négocie aux alentours de 12 €. Quel est le prix négocié par la Région dans la contrat avec la Ueshima coffee corporation ?
Un bon cueilleur récolte, au plus, 25 kilos de baies mures à point par jour,
Il faut entre 8 kilos et 8,5 kilos de baies pour obtenir 1 kilo de café vert.
Sur la base du SMIC , une journée de récolte reviendra à 55 € et le kilo récolté coûtera ±2,20€.
Le kilo de café vert revient donc en frais de récolte à .............2,20x 8= 17,6€
Si on tient compte des frais d'entretien du champ évalués arbitrairement à ±1€ , au dépulpage, au séchage et au décorticage évalués à 7€ il faudrait vendre le kilo de café vert
17,6+7+1 = 24,6 € .
............................... soit près de 25€
Et ce n’était pas tout. À partir de quelles observations sur quels sujets avait été constaté le nanisme du Coffea laurina que la thèse présentait comme une caractéristique de la variété ? À partir de sujets issus de graines collectées chez des particuliers par le CIRAD ? En tout cas, la photo présentée à la page 63 du livre de Marc Rivière rendait ce constat plus que suspect. D’autant plus que le plant de café présenté était issu d’une souche pure retrouvée au fond des forêts et que sa croissance avait été suivie par l’auteur de La Réunion et le café.
Le troisième pavé tombait dans la mare du CIRAD avec la parution d’un long article dans le Quotidien de la Réunion du 2 octobre 2006. En annonçant la mise sur le marché d’un produit commercialisé sous le nom de Bourbon pointu, l’Association de Protection du Café Bourbon Pointu (APCBP) qui avait misé sur du café cultivé à Madagascar et commercialisé à la Réunion prenait le devant sur le plan mûri par le CIRAD en devenant la référence en matière de label et de prix.
La polémique qui s’engageait dans la presse révélait que les cultivateurs qui suivraient le projet du CIRAD ne pourraient pas, en situation réelle de production, supporter les frais qui leur incombaient.
Pis ! Le promoteur du nouveau produit était contraint de reconnaître que ce qu’il allait commercialiser sous le nom de Bourbon pointu était un mélange dans lequel le Coffea laurina n’entrait que pour une infime proportion. Le plan de relance voulu par la Région n’étant pas encore arrivé à sa phase commerciale, pendant plusieurs mois donc le goût de référence du pointu allait être celui d’un café qui n’était pas le pointu : un comble pour un produit dont toute la promotion devait se faire sur la spécificité de la saveur ! Or, ce désastre se lisait entre les lignes de l’analyse de Marc Rivière
Peut-on, dès lors, considérer que l’opération de communication que représente la photo du Président du Conseil Régional aux côtés du représentant de la Ueshima coffee corporation (le Quotidien du 24/01/2007) est un joker ? Une carte de la dernière chance de l’initiateur de la relance du café qui, conscient de la gravité de la situation, est monté en première ligne ?
On peut l’interpréter ainsi, si l’objectif était de jouer la carte du tout commerce international. En effet, le choix d’un interlocuteur privilégié peut assurer l’écoulement d’une production, somme toute peu importante. Il reste à espérer que la production commercialisée restera, dans sa totalité, fidèle à la qualité de l’échantillon présenté aux visiteurs japonais.
En définitive, pour gagner la bataille, il faut d’abord évacuer l’amalgame que véhicule le nom « Bourbon pointu » en l’appelant « café pointu » ou « pointu de Bourbon ».
Dans le même temps, il faut faire redécouvrir aux Réunionnais le pointu là où il existe : comment discerner les arbustes de cette variété des autres cafés, quand cueillir, comment traiter la cueillette, comment torréfier, doser, etc… Cette accoutumance au goût est la meilleure promotion.
C’est cet environnement favorable au café pointu qui permettra aux producteurs, en ne se fiant pas à la seule exportation, de passer par dessus le déséquilibre entre le coût de production et le prix de vente à l’intermédiaire en allant, pour ceux qui le souhaiteraient, directement du producteur au consommateur. .......Roger Théodora, Mars 2007
Nos craintes étaient justifiées
Le 22/04/2007, la presse a rendu compte d'une conférence de presse donnée conjointement par la Région Réunion et le Cirad le 20/04/2007. "Difficile d'imaginer le laurina remplacer la canne, même après 2014 et la fin des aides à la filière sucre. Plus modestement, la Région et le Cirad espèrent dans un premier temps convaincre 200 exploitants de se lancer dans l'aventure. C'en est bien une: il faut attendre trois ans pour une première récolte. Et ne pas espérer plus d'un Smic pour une surface de trois hectares." Le Quotidien du dimanche 22/04/07 page 7.
La Ueshima coffee corporation achètera le café vert à 12 € le kilo et revendra les 100 grammes à 50 € Le Journal de l'Île de la Réunion du dimanche 22/04/07 page
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Arôme et saveur |
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Et un, et deux, et trois pavés dans la mare… |
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